« Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière ; sur ceux qui habitaient le pays de l’ombre, une lumière a resplendi » ainsi s’ouvrait, la liturgie de la Parole en la nuit de Noël. Cet oracle, tiré du prophète Isaïe (Is 9,1) se poursuivait part l’annonce de la venue au monde d’un enfant, d’un futur roi qui exercerait la justice et le droit et qui assurerait pour son peuple une paix sans fin. Les premier chrétiens y ont vu l’annonce de la naissance de Jésus, reconnaissant en Isaïe le témoin d’une lumière non encore visible. C’était là de la part du prophète, une belle manifestation d’espérance ; l’espérance cette vertu théologale dont Péguy a dit qu’elle « aime ce qui sera ».
Et, en cette autre nuit que la précédente annonçait, celle de la nativité, les anges s’adressant aux bergers, éveillent en eux cette même espérance qui relève et met en marche : « Ne craignez pas, car voici que je vous annonce une bonne nouvelle, une grande joie pour tout le peuple : aujourd’hui vous est né un Sauveur, dans la ville de David ». Et nous voyons se lever et se hâter les bergers vers la crèche où repose l’enfant.
Aujourd’hui encore, reconnaissons-le, la nuit en laquelle s’aventure notre monde contemporain, malmené par la violence, égaré par l’idolâtrie du pouvoir et de l’argent et même, de façon nouvelle, traversée d’inquiétude quant au devenir de la planète, n’est pas moins obscure que celle décrite par Isaïe ou que celle endurée par les bergers d’une Palestine sous occupation romaine.
Et bien, au plus creux de cette nuit du monde, au plus fort de la tempête, un phare s’allume encore aujourd’hui, Noël nous apporte une lumière d’espérance. Elle est ténue et fragile comme tout ce qui naît et qui germe doucement, mais elle se lève à l’orient, elle annonce le soleil de plein midi et le calme radieux qui suit la tempête ! Quel est ce feu brûlant déjà mais vacillant encore comme la flamme naissante d’une bougie qu’il faut protéger de la paume de sa main ? « Un enfant nous est né, un fils nous a été donné ».
Là se cache le mystère de Noël. Nous attendons un nouveau David prêt à pourfendre les ennemis, voici que le sauveur du monde se livre à nous sous les traits fragiles d’un enfant !
Et si justement Noël nous dévoilait, en l’enfant de la crèche l’authentique visage de Dieu ? Non pas un Dieu lointain et terrible, à l’image de l’homme quand dans son orgueil il se prend pour un dieu, mais un Dieu désarmé, livré à notre sollicitude, un Dieu accessible aux plus petits, un Dieu dont la pauvreté et l’humilité suffisent à remiser nos armes, à les transformer en soc de charrue pour préserver et entretenir cette vie et cette paix qu’il apporte en sa vulnérabilité même.
L’espérance prend chair et se renforce de tous ces petits gestes que nous sommes appelés à poser au quotidien pour protéger la vie en sa fragilité, préserver la planète et sa biodiversité, limiter nos biens matériels et notre consommation au profit du partage et de la relation fraternelle.
Ne craignons pas, Dieu vient faire route avec nous. Bonne année à tous. Bloavez Mad.
Frère Jean-Michel, abbé
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